"It was the best of times, it was the worst of times..."
Charles Dickens. A Tale of Two Cities.


jeudi 9 octobre 2008

Odeur de sainteté?


Il y a 50 ans, nous rappelle l'hebdomadaire allemand Der Spiegel dans son édition de cette semaine, mourait Eugenio Pacelli, le pape qui gouverna l'Eglise sous le nom de Pie XII de 1939 à 1958. On apprend dans ce même article que l'instruction de son procès en béatification, commencée il y a 41 ans, est terminée, et qu'il ne manque plus que la signature du pape actuel pour qu'il soit proclamé bienheureux par l'Eglise catholique. Or cette béatification suscite bien des réserves, et ce au sein même de l'Eglise. On sait combien le rôle de Pie XII pendant la guerre est controversé. On se souvient de la pièce que Rolf Hochnut lui a consacrée, Le Vicaire, et du film que Costa-Gavras en a tiré. S'il est indéniable que Pacelli s'employa secrètement à sauver un certain nombre de Juifs, il n'en reste pas moins qu'il ne condamna jamais publiquement la politique nazie ni les principes dont elle s'inspirait. (Alors que Der Spiegel nous rappelle qu'à la veille de sa mort, son prédécesseur, Pie XI, qui avait déjà eu le cran de se retirer dans sa résidence de Castelgandolfo lors de la visite de Hitler à Rome pour n'avoir pas à le rencontrer, mettait la dernière main à une encyclique intitulée "Humani Generis Unitas" - "L'unité du genre humain" - qui proclamait solonnellement l'incompatibilité de toute forme de racisme avec la foi catholique). Personne ne peut trancher de façon péremptoire la question de savoir si, les choses étant ce qu'elles étaient, la politique du profil bas adoptée par Pie XII a été plus efficace en termes de vies sauvées qu'une politique d'opposition plus résolue l'eût été. Il est certain que sa marge de manoeuvre était étroite. Il n'en reste pas moins qu'on peut se demander s'il est vraiment approprié de proclamer bienheureux, et donc de proposer comme modèle de vertu chrétienne, l'homme qui présidait aux destinées de l'Eglise lorsque celle-ci, à la fin de la guerre, aida- très efficacement cette fois - des milliers de criminels nazis ou collaborationnistes à échapper à la justice et à se soustraire ainsi au châtiment qu'ils méritaient.

P.-S.: l'article du Spiegel nous rapporte un épisode pour le moins curieux révélé par l'historiel Michael Hesemann dans un livre qu'il a consacré à Pie XII. Celui-ci aurait été convaincu dès 1939 que Hitler était possédé par le diable, au point qu'il aurait tenté de l'exorciser à distance, une fois dans sa chapelle privée, une autre fois encore devant la fenêtre ouverte de son appartement. Comme on le sait, malheuseusement, cela n'a pas marché...

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