"It was the best of times, it was the worst of times..."
Charles Dickens. A Tale of Two Cities.


mercredi 15 octobre 2008

Contre nous de la tyrannie


Les faits: lors d'un match amical France-Tunisie au Stade de France, une majorité de spectateurs, dont on peut supposer qu'il s'agissait de jeunes Français d'origine tunisienne, a sifflé la Marseillaise. Qu'en penser? Que c'est dommage bien sûr, que cela montre le ressentiment d'une part importante des jeunes immigrés de deuxième ou troisième génération à l'égard d'un pays qu'ils ne sentent pas comme le leur bien qu'ils en soient formellement citoyens etc. etc. etc.
Je conçois tout à fait qu'on s'en scandalise, que toutes sortes d'opinion s'expriment à ce sujet dans le débat public etc.
Mais voici maintenant que la chose devient une affaire d'Etat. Le président de la République convoque le président de la F.F.F.. Et le premier ministre laisse entendre que les gens qui se rendent aux matchs pour siffler les hymnes nationaux pourraient être interdits de stade. Le parquet de Bobigny aurait même ouvert une procédure pour outrage à l'hymne national.
Une fois de plus, on est en présence de deux des traits qui caractérisent de plus en plus la vie publique de ces dernières années: d'une part, le besoin presque compulsif d'adopter, au nom d'urgences imaginaires, des mesures juridiquement bâclées et oublieuses des principes mêmes sur lesquels nos institutions sont censées reposer ; d'autre part, la volonté de criminaliser, au sens fort de rendre passible de sanctions pénales, l'expression de toute opinion qui n'a pas l'heur d'agréer à tel ou tel pouvoir (et le pouvoir politique n'est pas seul en cause: on sait l'obsession répressive de tant d'organisations communautaristes).
Qu'on le veuille ou non, le fait de siffler l'hymne français lors d'une manifestation sportive est l'expression d'une opinion, si fruste cette expression soit-elle, quelque regrettable que soit cette opinion.
Je crains décidément que la liberté d'expression, principe cardinal de la démocratie, ne soit bien mal en point - et il n'est pas grand monde pour s'en émouvoir.

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