"It was the best of times, it was the worst of times..."
Charles Dickens. A Tale of Two Cities.


samedi 1 novembre 2008

Matinée berlinoise


Je me suis réveillé à 5 h 30 ce matin, partie parce que j'avais hâte d'aller flâner dans la ville, partie aussi, plus prosaïquement, parce que les cinq pintes de Berliner Kindl bues hier se sont rappelées à mon bon souvenir. Je suis donc déjà dehors avant 7 heures. Une belle journée d'automne, lumineuse et froide, s'annonce. Sur la place Kennedy (c'est la place de la mairie de l'arrondissement de Schöneberg, où Kennedy a prononcé son fameux "Ich bin ein Berliner"), qui fait face à la rue où je loge, les exposants d'un marché aux puces commencent d'installer leurs éventaires. Après avoir mangé un Butter-Croissant et bu un café, je me suis acheminé par la Martin-Luther-Strasse vers Tiergarten. Rien de plus agréable que de traverser une ville à l'heure où elle dort encore, comme c'est le cas le samedi matin à 7 heures. Rues presque désertes, peu de circulation automobile, quelques joggers matinaux, des gens qui promènent leur chien. Il y a je ne sais quoi de satisfaisant pour l'oeil dans l'urbanisme de Berlin, les volumes des bâtiments, la largeur des avenues, la multitude des perspectives et des échappées, moins apprêtées, moins délibérées que celles de Paris. L'automne est moins avancé ici qu'à Lausanne. La plupart des arbres ont encore leurs feuilles, incendiées des mille nuances intermédiaires qu'il y a du rouge au jaune. Je remonte la 17. Juni-Strasse jusqu'à la porte de Brandebourg, il est 8 heures à présent mais le calme règne encore sur Berlin. Depuis la porte de Brandebourg, j'emprunte Unter den Linden, puis la Karl-Liebknecht-Strasse jusqu'à l'Alexander-Platz. Je n'ai aucun but précis, si ce n'est de jouir de cet itinéraire canonique à cette heure inusuelle d'un jour encore tout neuf. L'architecture ingrate de Berlin-Est me fait penser à nouveau à ce que j'écrivais récemment ici, sur l'Ostalgia. Je crois en fait que nous sommes à ce point assaillis de belles images, lisses, léchées, putassières aussi, car c'est quand même ça le moteur de la publicité, je crois que nous sommes à ce point saturés de cette beauté factice et criarde, qui à la longue finit par émousser les sens, qu'on se surprend à trouver un certain repos de l'oeil et de l'esprit dans la grisaille et même dans la laideur. C'est comme une sorte de purge, de purification. Quand je reviens vers la porte de Brandebourg, Unter den Linden s'est animé entre-temps. Sur Pariser-Platz, les touristes sont déjà nombreux. Le tourisme de masse est une calamité. Je me refuse désormais à dialectiser ce genre de vérités, je me ferme à toute explication sociologique suggérant que toutefois ceci, toutefois cela. Une vérité reste telle même si elle devient un lieu commun: le tourisme de masse est une calamité, la publicité omniprésente est une calamité, la société de consommation est une calamité.
Je reviens par Postamer-Platz, puis Postdam-Strasse, puis je rejoins Martin-Luther-Strasse. Place Kennedy, je fais un tour du marché aux puces, y trouve deux livres. Je déjeune d'une Bratwust im Brötchen achetée à un vendeur ambulant sur la place, bouquine un peu assis sur un banc, puis je rentre à l'hôtel me reposer un peu. J'ai fait une bonne quinzaine de kilomètres depuis ce matin.

Photo: Berlin ce matin par moi-même

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