"It was the best of times, it was the worst of times..."
Charles Dickens. A Tale of Two Cities.


vendredi 26 décembre 2008

Choses vues

Comme je le disais récemment, je lis en ce moment le premier volume de Choses vues de Victor Hugo, relatif à la période 1830-1846. Ce sont des textes écrits au jour le jour qu'il est difficile de ranger sous un genre particulier. Ils tiennent à la fois du journal intime, du reportage, de la chronique etc. Ce qui est intéressant, c'est qu'ils nous montrent un Hugo moins guindé que dans le reste de son oeuvre, moins tonnant et prophétisant, une sorte de Hugo unplugged si l'on veut. On peut y trouver aussi bien le compte-rendu de conversations en tête à tête qu'il avait avec Louis-Philippe, qui le recevait régulièrement au Louvre le soir de façon assez informelle (la cour du "roi bourgeois" n'avait évidemment plus rien à voir avec la cour d'Ancien Régime), que le récit de ses flâneries dans Paris, y compris dans les quartiers populaires. Et c'est en cela que réside le grand intérêt de ces textes. Je crois que nous n'avons plus l'exemple aujourd'hui d'un intellectuel qui fréquenterait le gratin politique et qui en même temps se rendrait régulièrement en personne et incognito dans les banlieues pour voir ce qui s'y passe. Or Hugo, tout poète consacré et académicien qu'il était déjà, se montre curieux de savoir ce qui se passe à Paris, d'observer directement cette ébullition des classes populaires dont on voit qu'elle était constante entre 1830 et la nouvelle explosion de 1848. On le voit donc payer de sa personne pour aller voir du côté des barricades quand il s'en dresse quelque part vers le faubourg Saint-Antoine, dont on sait que ce fut au XIXe siècle l'épicentre de tous les grands soulèvements parisiens.
Mais au-delà de l'aspect proprement politique, on voit que Hugo, anticipant le Baudelaire du Spleen de Paris, est fasciné par le spectacle de la ville, par la façon dont elle se représente en permanence, par la façon dont elle se dit à travers les enseignes des magasins, les affiches etc. Il note scrupuleusement une foule de petits détails de ce genre, qui permettent parfois de saisir en raccourci des mouvements de fond qui travaillaient la société de l'époque.

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