Ouvrier de chez ZIL

N'étant pas un oligarque, j'habite un petit appartement dans un ensemble d'immeubles ayant appartenu à l'époque soviétique à l'usine automobile ZIL, située à proximité, qui y logeait son personnel. Après la chute de l'URSS, les appartements ont été donnés en propriété à leurs occupants, l'Etat se réservant la propriété du foncier et des parties communes (il n'y a donc pas de copropriété à proprement parler). Ce sont des immeubles en briques de six étages, ni beaux ni laids, séparés par des espaces verts et des terrains de jeux pour enfants. Ils ont été construits à la fin des années 50 et au début des 60, mais ce ne sont pas toutefois ce que les Russes appellent des "kroutchevka", ces immeubles construits à la hâte à l'époque du secrétaire général éponyme pour absorber les populations des campagnes venues travailler dans les villes. Ce qui fait la spécificité des kroutchevka, c'est qu'elles étaient pensées initialement comme des habitations provisoires, destinées à ne durer que 25 ans pour être remplacées à terme par des immeubles plus durables. Comme il fallait s'y attendre, elles ont duré jusqu'à aujourd'hui, et elles se reconnaissent, un peu partout dans l'ex -URSS, à leur architecture fruste, à la mauvaise qualité de leurs matériaux (les façades sont faites de panneaux en ciment mal joints) et à leur vétusté précoce et ingrate.
Non, les immeubles de l'ensemble où j'habite ont été construits avec un certain soin: ils étaient destinés après tout à loger des ouvriers, qui n'étaient pas les derniers servis en URSS.
Héritage du principe "one size fits all" dans sa rugueuse version soviétique, le chauffage est centralisé ici non pas au niveau de l'immeuble, mais au niveau de la ville elle-même, et de façon très peu nuancée. Ce qui fait qu'à une certaine date, abstraction faite de la température effective, on allume ou on éteint le chauffage pour l'ensemble de la ville: on peut donc grelotter en avril, pour peu que le printemps soit tardif, ou étouffer de chaleur dans son appartement en novembre, si le froid se fait attendre. C'est un peu le cas aujourd'hui, où il fait doux pour la saison (4-5°), si bien que l'appartement est surchauffé et qu'on doit ouvrir les fenêtres, mais il paraît que le vrai froid russe devrait arriver dans quelques jours.

Photo: l'immeuble où je loge, et Luca qui gambade.