Dans l'ouvrage dont je parlais la semaine dernière, Jacques Schiffrin, dont il convient de rappeler qu'il se situe très à gauche dans le paysage politique américain, fournit une interprétation du maccarthysme, que je vous livre sous bénéfice d'inventaire car je ne suis pas un spécialiste de l'histoire des Etats-Unis, mais qui me semble pour le moins plausible jusqu'à plus ample informé. Selon Schiffrin, par delà les communistes, la chasse aux sorcières dont McCarthy fut la figure de proue visait toutes les personnes qui, en particulier au sein de l'administration américaine, avaient d'une façon ou d'une autre collaboré à la conception et à l'application de la politique du New Deal sous la présidence Roosevelt. Par ce biais, son objectif inavoué était de saboter la mise en oeuvre de la politique du Fair Deal de Trumann (dont les artisans se recrutaient précisément parmi le personnel des administrations Roosevelt), qui se plaçait dans le prolongement du New Deal, et qui prévoyait un certain nombre d'avancées sociales analogues à celles qui virent le jour à la même époque en Europe de l'Ouest.
En d'autres termes, l'épisode maccarthyste ne devrait pas être lu uniquement au prisme de la guerre froide et de la lutte idéologique, mais aussi du point de vue des rapports de force sociaux et politiques internes aux Etats-Unis. Schiffrin va même plus loin, puisqu'il soutient en quelque sorte que, en cette occasion comme à d'autres reprises dans l'histoire récente des Etats-Unis, une politique étrangère agressive a été le moyen pour les dirigeants américains de détourner l'attention des citoyens des problèmes intérieurs, bref une espèce d'opération de diversion, si bien que ce serait en quelque sorte la lecture inverse qui serait la plus pertinente: le maccarthysme, entendu comme instrument de politique intérieure, expliquerait la guerre froide, bien plus que la guerre froide n'expliquerait le maccarthysme. Quoi qu'il en soit, Schiffrin conclut amèrement que cette politique a porté ses fruits, puisqu'elle s'est traduite par un déplacement marqué vers la droite de l'ensemble du paysage politique américain, dont les conséquences se font encore sentir aujourd'hui.
Jacques Schiffrin, Allers-retours, Liana levi, 2007.
En d'autres termes, l'épisode maccarthyste ne devrait pas être lu uniquement au prisme de la guerre froide et de la lutte idéologique, mais aussi du point de vue des rapports de force sociaux et politiques internes aux Etats-Unis. Schiffrin va même plus loin, puisqu'il soutient en quelque sorte que, en cette occasion comme à d'autres reprises dans l'histoire récente des Etats-Unis, une politique étrangère agressive a été le moyen pour les dirigeants américains de détourner l'attention des citoyens des problèmes intérieurs, bref une espèce d'opération de diversion, si bien que ce serait en quelque sorte la lecture inverse qui serait la plus pertinente: le maccarthysme, entendu comme instrument de politique intérieure, expliquerait la guerre froide, bien plus que la guerre froide n'expliquerait le maccarthysme. Quoi qu'il en soit, Schiffrin conclut amèrement que cette politique a porté ses fruits, puisqu'elle s'est traduite par un déplacement marqué vers la droite de l'ensemble du paysage politique américain, dont les conséquences se font encore sentir aujourd'hui.
Jacques Schiffrin, Allers-retours, Liana levi, 2007.
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