J'ai lu hier soir d'une seule traite Vladimir ou le vol arrêté de Marina Vlady, livre de souvenirs paru en 1987 dans lequel elle raconte sa vie avec Vladimir Vissotsky, dont elle fut la compagne puis la femme de 1967 à 1980, année de la mort du grand acteur et chanteur russe.
C'est à la fois un témoignage émouvant sur leur histoire d'amour et un document intéressant sur l'URSS des années 70.
J'avais consacré un billet à Vissotsky début novembre après avoir visité le musée qui lui est consacré à quelques pas du théâtre Taganka à Moscou.
Vissotsky fut immensément populaire en URSS comme auteur-compositeur-interprète de chansons magnifiques, dont les textes, très ancrés dans la vie soviétique de tous les jours, sont de véritables poèmes, et qu'il chantait le plus souvent en s'accompagnant seul à la guitare.
Marina Vlady raconte bien comment, malgré cette popularité (peut-être devrais-je dire: à cause de cette popularité), il était mal vu des autorités, si bien qu'il fut en butte tout au long de sa carrière à toutes sortes de résistances et de tracasseries. N'oublions pas que, dans un pays où toutes les activités économiques et culturelles étaient concentrées dans les mains de l'Etat, la possibilité de tenir un concert ou d'enregistrer un disque dépendait du bon plaisir de ce dernier.
Or, Vissotsky ne put enregistrer qu'un nombre infime de disques en URSS du fait de son statut de "personnalité odieuse" (sic) etc.
Ce que l'on comprend toutefois par le récit de Vlady, c'est qu'ici encore, comme dans le cas de Brodsky dont j'ai parlé à plusieurs reprises le mois dernier, l'hostilité du régime n'était pas tant liée à des positions politiques qu'à l'indépendance d'esprit et à la liberté de moeurs dont Vissotsky faisait preuve. On en vient en fait à penser que certaines aspects du régime soviétique post-stalinien qualifiés de répressifs ne doivent pas être nécessairement jugés d'un point de vue strictement politique, mais qu'ils témoignent bien plutôt d'une étroitesse d'esprit, d'un conformisme moral et social, d'une pudibonderie bien-pensante dont on trouve l'exemple après-guerre dans les pays occidentaux également (il suffit de penser au puritanisme des Etats-Unis dans les années 50 etc.).
Il est intéressant de noter aussi comment quelqu'un comme Vissotsky, tout en faisant figure de "contestataire" aux yeux du régime, était viscéralement patriote, au point, comme le raconte Vlady, de n'admettre que du bout des lèvres l'injustice des interventions soviétiques en Hongrie ou en Tchécoslovaquie.
Elle rapporte également de façon vraiment poignante la douleur éprouvée par Vissostsky lors de sa première visite en Allemagne de l'Ouest, dans les années 70, au spectacle de l'abondance qui y régnait: comment était-il possible que les Allemands, qui avaient perdu la guerre, jouissent d'un tel bien-être, alors que son peuple, qui l'avait gagnée, vivait dans la pénurie?
C'est à la fois un témoignage émouvant sur leur histoire d'amour et un document intéressant sur l'URSS des années 70.
J'avais consacré un billet à Vissotsky début novembre après avoir visité le musée qui lui est consacré à quelques pas du théâtre Taganka à Moscou.
Vissotsky fut immensément populaire en URSS comme auteur-compositeur-interprète de chansons magnifiques, dont les textes, très ancrés dans la vie soviétique de tous les jours, sont de véritables poèmes, et qu'il chantait le plus souvent en s'accompagnant seul à la guitare.
Marina Vlady raconte bien comment, malgré cette popularité (peut-être devrais-je dire: à cause de cette popularité), il était mal vu des autorités, si bien qu'il fut en butte tout au long de sa carrière à toutes sortes de résistances et de tracasseries. N'oublions pas que, dans un pays où toutes les activités économiques et culturelles étaient concentrées dans les mains de l'Etat, la possibilité de tenir un concert ou d'enregistrer un disque dépendait du bon plaisir de ce dernier.
Or, Vissotsky ne put enregistrer qu'un nombre infime de disques en URSS du fait de son statut de "personnalité odieuse" (sic) etc.
Ce que l'on comprend toutefois par le récit de Vlady, c'est qu'ici encore, comme dans le cas de Brodsky dont j'ai parlé à plusieurs reprises le mois dernier, l'hostilité du régime n'était pas tant liée à des positions politiques qu'à l'indépendance d'esprit et à la liberté de moeurs dont Vissotsky faisait preuve. On en vient en fait à penser que certaines aspects du régime soviétique post-stalinien qualifiés de répressifs ne doivent pas être nécessairement jugés d'un point de vue strictement politique, mais qu'ils témoignent bien plutôt d'une étroitesse d'esprit, d'un conformisme moral et social, d'une pudibonderie bien-pensante dont on trouve l'exemple après-guerre dans les pays occidentaux également (il suffit de penser au puritanisme des Etats-Unis dans les années 50 etc.).
Il est intéressant de noter aussi comment quelqu'un comme Vissotsky, tout en faisant figure de "contestataire" aux yeux du régime, était viscéralement patriote, au point, comme le raconte Vlady, de n'admettre que du bout des lèvres l'injustice des interventions soviétiques en Hongrie ou en Tchécoslovaquie.
Elle rapporte également de façon vraiment poignante la douleur éprouvée par Vissostsky lors de sa première visite en Allemagne de l'Ouest, dans les années 70, au spectacle de l'abondance qui y régnait: comment était-il possible que les Allemands, qui avaient perdu la guerre, jouissent d'un tel bien-être, alors que son peuple, qui l'avait gagnée, vivait dans la pénurie?
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